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11 février 2023

Mediator : Servier en appel

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Mon ami Jean-Claude Bourret a publié ce post aujourd'hui sur Facebook :

Laboratoires pharmaceutiques, injustement condamnés...
Comme Pfizer, le laboratoire Médiator, a été injustement condamné en premier jugement, face à une enquête opiniatre d'un médecin cardiologue Brestois : le docteur Irène Frachon.
Le procès en appel vient de commencer.
Et que reproche-t-on au laboratoire Servier : des accusations extravagantes : plus de mille morts, des dizaines de milliers de patients dont le système cardiaque est bousillé à vie...bref rien de sérieux comme chacun peut l'imaginer, au contraire du docteur Irène Frachon.
Ce médecin, que vous avez peut-être vu sur la 5 dans l'émission littéraire , vient de publier ( 23 euros aux éditions Delcourt) une remarquable BD de 200 pages, ou vous allez découvrir comment, par le mensonge, les pressions, les pots de vin, un médicament destructeur de santé, a pu être vendu et remboursé par la SS, pendant...40 ans !
Enfin, ça, c'est ce qu' affirme le Dr Irène Frachon, qui a lancé l'alerte et s'est battue presque seule, contre Servier pendant...trente ans !
Et qui a fait condamner Servier en première instance.
Les attendus du procès en appel , qui vient de commencer et qui va durer plusieurs mois, sont particulièrement ...attendus.
J'ai rarement lu une BD aussi passionante, et qui montre la pourriture absolue, d' acteurs de la santé parfaitement identifiés et décrits.
Mediator. Un crime chimiquement pur. 200 pages de BD passionnantes. Editions Delcourt. 23 euros.Irène Frachon, Eric Giacometti, François Duprat.
........
Je salue d'abord le courage et la ténacité d'Irène Frachon qui ont permis à la vérité d'émerger malgré une volonté largement partagée dans les allées du pouvoir d'étouffer cette affaire.
Ensuite je tiens à faire part de mon expérience personnelle avec le Mediator. J'ai toujours su que c'était une amphétamine déguisée. La différence avec d'autres scandales pharmaceutiques c'est qu'ici il y a tromperie délibérée dès le lancement du médicament en maquillant ce qu'il est vraiment. Je n'ai jamais prescrit le Mediator et je passais mon temps à l'arrêter chez mes patients qui en recevaient, avec lettre explicative à leur médecin traitant. Il arrivait que celui-ci prescrive à nouveau le Mediator, auquel cas je donnais le choix au patient : soit il ne venait plus me voir en consultation, soit il changeait de médecin traitant.
Il y a une façon simple de savoir si un médicament est une amphétamine, c'est la toxicité de groupe. La mortalité induite par le médicament est plus élevée et intervient pour des doses plus faibles si les animaux sur lesquels il est testé sont en groupe que s'ils sont isolés. Lorsque je travaillais dans un centre de recherche de l'industrie pharmaceutique, nous avons mis au point un psychostimulant, le modafinil. Il était important de vérifier qu'il ne s'agissait pas d'une amphétamine. Nous l'avons vérifié, il n'y avait pas de toxicité de groupe. À noter que les amphétamines ont permis la victoire lors du débarquement en Normandie de Juin 1944 et que le Modafinil a été le médicament de la guerre du Golfe pour doper les soldats occidentaux.
J'ai demandé à plusieurs reprises le dossier toxicologique du Mediator à Servier. J'ai reçu des centaines de pages mais jamais la toxicité de groupe malgré mon insistance. Or il est certain que ça fait partie du dossier. Non seulement il y a cette tromperie unique dans les annales de l'industrie phamaceutique, mais cela n'a pas pu se faire sans la complicité de personnes politiques et de hauts fonctionnaires du ministère de la santé.
Pour terminer, certains de mes collègues et moi avions un adage : étude Servier étude truquée. Voilà ce que j'écrivais il y a vingt ans, en 2003, sur deux études Servier, Progress et Europa :

EUROPA  

 

Encore Une Raison d’Oublier le Périndopril à l’Avenir

 

L’antécédent PROGRESS :

 

SERVIER nous avait habitué à extrapoler un peu abusivement à partir d’une étude. PROGRESS, à la différence d’EUROPA, est méthodologiquement correcte, seules les conclusions que SERVIER en tire sont erronées, on n’a pas le droit d’en déduire la moindre activité favorable du PERINDOPRIL. Sans reprendre en détail l’étude, rappelons que PROGRESS comporte 2 sous-groupes, l’un sous PERINDOPRIL, l’autre sous PERINDOPRIL et INDAPAMIDE 2,5mg. Seul ce sous-groupe voit une diminution significative des AVC. L’HTA dans le sous-groupe traité est d’environ 2cm Hg plus basse que dans le groupe non traité. Les données épidémiologiques sur l’HTA montrent qu’une telle amélioration du pronostic peut être attendue dès qu’une telle différence de valeurs tensionnelles est observée. PROGRESS confirme, selon un protocole correct, que le contrôle tensionnel est efficace dans la prévention des AVC. C’est tout. En aucun cas on ne peut conclure à une efficacité du PERINDOPRIL en lui-même, surtout qu’il n’est efficace qu’en association avec un diurétique, celui-ci prescrit à un dosage supérieur à celui qu’on trouve dans les associations qui l’utilisent.

 

EUROPA :

 

Pour EUROPA, c’est beaucoup plus grave, le protocole n’est pas correct. Nous sommes surpris que les comités censés le surveiller aient validé tant d’erreurs de procédure :

 

  • Critère principal d’évaluation changé en cours d’étude.
  • Durée allongée de 4 à 5 ans en cours d’étude.
  • Âges non comparables dans les deux groupes. La différence est significative pour les moins de 55 ans. Pour les plus de 65 ans ils sont plus nombreux dans le groupe placebo, mais la différence n’est pas significative. Il est normal, même si on ne traite pas, qu’il y ait moins d’évènements pathologiques quelle qu’en soit la nature chez des sujet plus jeunes !
  • Si on regarde les évènements pathologiques, on voit que la différence significative ne s’observe que pour l’infarctus du myocarde. Elle n’existe pas pour les autres évènements morbides ou létaux. L’utilisation d’un critère composite dont il faut rappeler qu’il a été modifié en cours d’étude conduit SERVIER à prétendre que le PERINDOPRIL est efficace sur l’ensemble des évènements vasculaires. En fait c’est la diminution du nombre d’infarctus qui tire tous les autres critères de manière artificielle et non probante. Là encore, est-il étonnant d’observer moins d’infarctus chez des sujets plus jeunes ?

 

Autre commentaire : l’objectif prétendument atteint est de prévenir un événement cardiovasculaire grave en 4 ans pour 50 patients traités. HOPE, par un protocole rigoureux et conforme, a prouvé une telle prévention avec le RAMIPRIL pour 24 patients traités.

Cette étude, non conforme aux « Bonnes Pratiques Cliniques », est inutilisable. Il n’est pas éthique d’en tirer les conclusions qui nous sont présentées.

Un jour, à un congrès de cardiologie à Stockholm auquel j'assistais, un de mes collègues a expliqué en chaire que Servier n'avait pas de droit de tirer les conclusions qu'il tirait de l'étude Progress. Dès la fin de son exposé il a été serré de près par des vigiles Servier qui lui ont expliqué qu'il était de son intérêt de ne plus jamais dire ça.

Une telle escroquerie n'aurait pas été possible sans un niveau élevé de corruption.

 

 

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